
Licht, une œuvre pour notre temps, par Maxime Pascal
L’écriture de Licht dure vingt-cinq ans, de 1978 à 2003, et les deux derniers opéras furent créés de manière posthume en 2011 et 2012. La post-modernité dans laquelle nous nous trouvons nous interroge de fait sur les compositeurs du répertoire récent et redéfinit la lecture que nous faisons aujourd’hui d’une œuvre monumentale comme Licht, sans aucun doute mal comprise et caricaturée à tort du vivant de son auteur.
Pour Karlheinz Stockhausen (1928-2007), tout converge dans sa trajectoire à l’élaboration de ce cycle démiurgique. Les trouvailles effectuées dans des pièces comme Gesang der Jünglinge (1956), Mantra (1970), Inori (1974) ou Harlekin (1975) se retrouvent organisées en un ensemble cohérent, qui exprime l’ambition d’un créateur alors mûr dans ses réflexions musicales et philosophiques. Licht tire ses racines dans une musique ancienne tout en ayant le regard dirigé vers le futur de l’art.
Chez Stockhausen, l’objet expressif se trouve dans la combinaison d’une écriture de l’espace et du temps. Stockhausen révèle un théâtre instrumental nouveau, prolongeant ainsi le geste enclenché par Berlioz et Strauss. Et avec la « superformule », l’ADN de ces vingt-neuf heures de musique, Stockhausen révèle un système musical nouveau, construit sur sa pensée et la signification qu’il attribue aux rythmes, intervalles, tempi et nuances. Passionnés par cette musique depuis la création de notre compagnie, Le Balcon, il était pour nous naturel de rêver une intégrale du cycle. Le texte de Licht imaginant des éléments non-réalisables à l’époque de son écriture, il nous pousse à un apprentissage et à un devoir d’invention fascinant, tant artistique que technique.
Le projet d’intégrale raconte ainsi l’histoire de cet apprentissage.
Maxime Pascal • Le Balcon : directeur artistique